L’engagement des matrones communautaires pour une maternité plus sûre en RCA

L’engagement des matrones communautaires pour une maternité plus sûre en RCA

Bangui – En République Centrafricaine, donner la vie reste un défi. Le pays affichait en 2023 l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde : 829 décès pour 100 000 naissances vivantes. Selon les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), ce chiffre devrait idéalement être inférieur à 70.

Derrière ces chiffres se cachent des réalités douloureuses : des femmes qui accouchent loin des structures de santé, des distances interminables à parcourir, des moyens limités et parfois des croyances qui freinent le recours aux soins.

Selon les données nationales, moins de 50 % des femmes enceintes effectuent les quatre consultations prénatales recommandées, et près d’un tiers des accouchements se font encore à domicile, exposant les mères et les nouveau-nés à des risques graves.

Pour relever ce défi, le pays mise sur une priorité : offrir à chaque femme des soins de qualité sans risque financier. C’est tout l’enjeu de la Couverture sanitaire universelle (CSU), qui transforme cette ambition en actions concrètes afin de réduire les inégalités et sauver des vies. La CSU met l’accent sur les soins essentiels – consultations prénatales, accouchements assistés par un personnel qualifié et prise en charge des complications – afin qu’ils soient accessibles à toutes, sans que la pauvreté ne soit un obstacle.

En RCA, cette approche est cruciale pour prévenir les décès évitables et offrir aux familles la possibilité de vivre en bonne santé. Elle contribue aussi à renforcer la confiance des communautés envers le système de santé, un facteur clé pour changer les comportements et encourager les femmes à recourir aux services disponibles.

Avec l’appui de l’OMS et le soutien d’un grand bailleur, le Gouvernement centrafricain a pris des mesures fortes pour améliorer la santé maternelle. La formation et le déploiement des matrones communautaires en sont un pilier. Ces femmes, choisies par leurs communautés, sont devenues des relais indispensables entre les familles et les structures de santé. Elles informent, accompagnent et orientent les femmes enceintes vers les maternités, tout en assurant un suivi après l’accouchement et pendant la période postnatale.

Leur mission va bien au-delà de l’accompagnement : elles contribuent à changer les comportements en expliquant pourquoi les soins prénatals et l’accouchement assisté sont essentiels pour éviter les complications. Leur présence rassure les familles et crée un lien de proximité qui sauve des vies.

Parmi elles, Erguine Souhat, matrone à Bria, incarne cet engagement au quotidien. « Une fois, en pleine nuit, j’ai dû accompagner une patiente à pied jusqu’à l’hôpital, prête à intervenir en chemin si nécessaire », confie Erguine. « Nous suivons les femmes du début de la grossesse jusqu’à la période qui suit l’accouchement, pour que la mère et l’enfant restent en bonne santé », ajoute-t-elle avec détermination.

Ces efforts s’appuient sur des directives claires au niveau national. Dr Romaric Ghislain Zarambaud Bohy-Ngombet, Directeur de la Santé familiale et de la Population au ministère de la Santé, précise : « Pour nous, la mortalité maternelle est une urgence nationale. Le ministre de la Santé nous a tracé une voie claire : renforcer les compétences des prestataires, améliorer les plateaux techniques et rapprocher les services des communautés. C’est ainsi que nous avançons vers la CSU. »

Dan Mauricette, Coordonnatrice nationale des matrones communautaires, confirme l’impact de ces mesures. « Aujourd’hui, nous comptons plus de 1 200 matrones actives dans 32 districts sanitaires sur les 35 que compte notre pays. Elles travaillent surtout dans les zones rurales où l’accès aux structures de santé est limité. Là où elles interviennent, on observe une diminution d’environ 30 % des accouchements à domicile et une augmentation du nombre de femmes qui vont en consultation prénatale », souligne-t-elle avec conviction.

L’OMS soutient ces avancées en renforçant à la fois les compétences et les moyens des structures de santé. En 2024, l’Organisation a contribué à équiper une trentaine de maternités en matériel médical, en mobiliers et en médicaments essentiels, créant ainsi des espaces d’accouchement plus sûrs et plus dignes. Elle a également formé 300 matrones communautaires aux soins essentiels de la grossesse et du post-partum, ainsi qu’à l’orientation rapide des cas compliqués. En parallèle, 64 prestataires de soins ont été outillés pour mieux reconnaître et gérer les risques gynécologiques. À travers cet appui technique continu, l’OMS aide les équipes à sauver davantage de vies chaque jour.

« Chaque maternité équipée, chaque matrone formée, c’est une vie qui peut être sauvée », affirme la Dre Caroline Clarinval, Représentante de l’OMS en RCA. « Notre objectif est clair : que chaque femme, où qu’elle vive, puisse donner la vie en toute sécurité. Cela passe par des protocoles adaptés, des compétences renforcées et une sensibilisation continue des communautés. »

Ces avancées changent des vies. Pour Albertine Shoura, mère de trois enfants, avoir le soutien d’une matrone a été décisif lors de sa grossesse et surtout pour l’accouchement : « Dans le passé, j’avais accouché à la maison et j’ai failli perdre la vie, ainsi que mon enfant. Grâce à l’accompagnement d’Erguine, j’ai pu mettre mon enfant au monde en sécurité à l’hôpital, entourée de soins appropriés. Je rends grâce à Dieu et je remercie Erguine d’avoir sauvé ma vie et celle de mon bébé », témoigne-t-elle.

Pour que ces progrès se consolident, les acteurs soulignent l’importance de maintenir la dynamique : poursuivre la formation, renforcer les équipements et assurer un accompagnement durable. Ces appuis supplémentaires permettront d’étendre les acquis et de rapprocher encore davantage les soins des communautés, afin que la CSU devienne une réalité pour toutes.

Après son expérience, Albertine regarde l’avenir avec optimisme : « Quand une mère survit et son enfant aussi, c’est toute une famille qui garde espoir. Je souhaite que chaque femme dans mon pays ait cette chance et que donner la vie devienne un moment de joie, jamais un danger. »
 

Cliquez sur l'image pour l'agrandir
Pour plus d'informations ou pour demander des interviews, veuillez contacter :
Kadijah Diallo

Chargée de communication
Bureau Régional de l'OMS pour l'Afrique 
Email: dialloka [at] who.int (dialloka[at]who[dot]int)

René Koundou IFONO

Chargé de communication

OMS - République Centrafricaine

Email : ifonor [at] who.int (ifonor[at]who[dot]int)